Au sommet de la Nuit. [PV Lucius]

Rien. Rien. Et encore, rien.
La place de la concorde était vide. De gens, de chats, de lumière, de rats, d'a peu près tout, en vérité. Sauf, bien entendu, de vent et de bruit. Il commençait même à tomber quelques fins flocons, légères touffes blanches qui ne tiendraient probabklement pas mais qui, pour l'heure, décoraient agréablement cette froide nuit de Septembre et se confondaient avec les étoiles.

Marion marchait d'un pas allègre, ses souliers vernis battant le pavé en cadence de la gigue qu'il se passait mentalement. Il avait toujours aimé la neige, et la façon dont il pouvait s'amuser avec sans que cela ne choquât personne. Un flocon lui tomba sur le nez, et il sourit, comme un enfant ravi d'entrer dans les vacances de Noël et que tout enchante. On n'aurait pas dit un homme,, ce soir là, plutôt un enfant, un adorable bambin candide et un peu naïf de se balader avec un inconnu à une heure pareille.
S'il s'était écouté, il se serait simplementlaissé emporter par le vent, et serait parti tourvbilloner avec les flocons. Parce qu'après tout, voler était tellement plus amusant que d'être coincé sur terre!

Enfin, quoiqu'il en fut, Marion était ravi et ne le cachait pas. Ses joues, comme le bout de ses oreilles et de son nez, étaient rouges de froid autant que de bonne humeur, et il était à deux doigt de battre des mains en regardant tomber la neige. Lui qui avait voulut venir pour la fameuse obélisque de la place, voila qu'il ne s'en souciait plus du tout à présent, comme si elle n'avait jamais existé, qu'elle n'avait pas d'importance. Il était là, il était bien, le reste ne comptait pas.

En louchant, il s'amusa à émettre un long panache de fumée blanche, comme il l'avait si souvent fait lorsqu'il était petit. Le lourd nuage de son haleine s'éleva légèrement mais, contrairement à l'ordinaire, il ne s'évapora pas, et s'enfuit vers le ciel, tache blanche sur le fond sombre.

"J'adore la neige." Lança le libraire à l'adresse de Lucius, qui l'avait suivit. "Il n'y en avait presque jamais, en Irlande."

Et les rares fois ou elle s'était décidée à tomber, elle n'avait jamais tenu longtemps, encore moins été bien acceuillie! Mais pouvait-on en blâmer les gens de la bas? La ou Marion avait vécu, il n'y avait que des agriculteurs, et la neige leur était à tous préjudiciable. Et si lui, petit libraire insignifiant, aimait la neige, cela ne signifiait pas que chacun se devait d'en faire autant.

Toutefois, ce soir là, il n'avait pas envie de se préoccuper de ce que pensaient les autres et, s'il ne tournoyait pas encore sur lui-même, cela ne saurait tarder. déjà, ses pieds s'agitaient un peu plus que de raison sur le sol glacé, et sa cape frémissait derrière lui, à contressens du vent.

Il avait bien le droit de s'amuser un peu, non?

Le vampire suivait Marion un peu en retrait, l'observant d'un air sombre, les mains dans les poches. Voila que le libraire agissait comme s'il découvrait la neige, un comble pour quelqu'un qui vivait dans un pays aussi froid que la France ! Il se comportait comme un enfant à peine sortit des langes, et cela faisait sourire intérieurement Lucius qui le trouvait encore plus appétissant ainsi.

"J'adore la neige." Lança le libraire à l'adresse de Lucius, qui l'avait suivit. "Il n'y en avait presque jamais, en Irlande."

Hum... l'Irlande... Voila ce qui expliquait son attitude, s'il n'y en avait jamais là bas. Mais tout de même, en voila une façon de se comporter dans la rue ! Le vampire ne répondit rien, se contentant de suivre le jeune homme d'une allure lente, ses pas résonnants sur les pavés avec un bruit mat et sec qui contrastait avec les pas enjoués de Marion. Avec ses vêtements et sa veste noire, seul son teint d'une blancheur de neige ressortait dans la pénombre, lui donnant un air plus inquiétant encore. De plus, la faim le tiraillait de nouveau...

Les deux hommes passèrent devant la grande obélisque et la place, mais n'y accordèrent aucune attention. Voyant le libraire s'emporter d'allégresse un peu plus à chaque pas, Lucius lui glissa cette recommandation d'un ton doucereux:

" Prenez garde à ne pas tomber mon cher, il serait regrettable qu'un autre accident arrive. "

En effet, un seul mort pour la soirée était suffisant, et Lucius ne désirait pas voir Marion tomber et se faire mal sans que le vampire n'y soit pour quelque chose. Il aimait avoir le contrôle sur ce qui l'entourait. Lucius sortit sa montre à gousset de sa veste pour consulter l'heure: il était une heure de matin. Une heure agréable, la moitié de la nuit. Il rangea l'objet et remis ses mains dans ses poches.
Il repéra alors un boulevard qui se trouvait à quelques rues de là ou nombres de fêtes commençaient à peine et ou les bars étaient chaleureusement bondés. Il ne savait pas ce que le libraire préférait, aussi lui dit-il d'un ton qu'il voulait enjoué:

" Par ou désirez-vous aller ? "

L'absence de réponse conjuguée à la alnteur délibérée des pas de Lucius contribua à faire redescendre un peu MArion. Le rouge de ses joue s'accentua, trahissant légèrement sa gêne. Apparement l'homme n'était guère friand de ce genre d'attitude.
Presque aussitôt, le libraire revint à un pas plus normal, réfrénant son envie de sautiller.

*Bravo. Je croyais que tu ne voulais pas t'occuper des autres, ce soir...*

A croire que c'était dans son sang. Il avait du hériter ça de ses parents. Il était totalement incapable de ne pas tenir compte de l'opinion des autres. Cela dit, on lui avait tellement répété qu'un original était vite soupçonné de choses pas nettes qu'il avait finit; pas juger plus prudent de rester en retrait. comme en plus il était, à son avis, sans grand intérêt, c'était venu tout naturellement.

'Prenez garde à ne pas tomber mon cher, il serait regrettable qu'un autre accident arrive.'

Un autre accident? Mon oeil oui! Marion n'y croyait pas. Il y avait eut trop de fureur dans son attitude sur le balcon. trop de haine et de rancoeur. Lucius était (et Marion en aurait mis sa main au feu) persuadé que son ami avait été assassiné. Mais là encore, il ne dit rien, se contentant de froncer brièvement les sourcils et d'enregistrer.

"Ne vous en faites pas, je ne suis pas en sucre!"

Ni en verre ou en cristal, d'ailleurs, si il voulait tout savoir. Néanmoins, malgré le ton légèrement agacé de sa remarque, il offrit à Lucius un sourir sincère.

'Par ou désirez-vous aller ?'

Le Libraire réfléchit un instant, contemplant les diverses options qui s'offraient à lui. Un peu plus loin sur la place, des bars étaient encore ouverts, dont un qui portait trèfle et motifs celtiques sur la devanture. Un air de gigue parvenait même à s'échapper par les fenêtre soigneusement calfeutrées...

"Je prendrais bien un verre et un repas chaud. Je pense que l'auberge qui est la bas fera l'affaire."

En silence, Marion commença d'avance puis, après un temps, il se retourna vers son compagnons:

"Etes vous déjà entré dans un Pub irlandais?"

Question importante s'il en était, car Marion savait que l'atmosphère qui y régnait pouvait parfois dérouter, voire rebuter le profane.

Lorsque Marion revint vers Lucius ce fut d'un pas on ne peut plus normal, le jeune homme ayant du remarquer l'attitude désapprobatrice du vampire. Lucius s'en voulait un peu de réprimer les envies enfantines de Marion, mais il ne pouvait pas accepter qu'on le voit en compagnie d'un gamin sautillant. Déjà, si Armand le voyait ainsi en compagnie d'un humain sans même tenter de lui prendre une goutte de sang, Lucius aurait eu droit à la scène de ménage, alors en plus le voir ainsi. Bref, le vampire préféra ne pas penser aux éventuelles critiques de son compagnon de théâtre, et fit un sourire désolé à Marion, ses yeux bleus scrutant les alentours d'un air amusé.

"Ne vous en faites pas, je ne suis pas en sucre!"

Ho il ne s'en faisait pas. Pas vraiment. Le jeune homme lui avait répondu d'un ton un peu agacé, et le vampire faillis lui répondre de se taire avec méchanceté, mais se retint à temps pour voir le libraire lui sourire. Il passait donc l'éponge là-dessus tout en suivant Marion de son pas lent et sur de lui. Marion se retourna vers lui pour lui demander:

"Etes vous déjà entré dans un Pub irlandais?"

Ce à quoi Lucius répondit d'un ton hésitant:

" Hum... oui, il y à quelques * siècles *... années. "

Cela faisait très longtemps que Lucius n'avait pas eu le loisir d'entrer dans une atmosphère purement Irlandaise. Il avait bien fréquenté ce genre de pub une ou deux fois dans sa vie, il y à environ deux cent ans, mais c'était loin maintenant tout ça, et les us et coutumes avaient du changer depuis cette époque. Le vampire n'en dit cependant rien, et fit un signe avenant à Marion, son sourire charmeur sur les lèvres:

" Je vous suit, vos désirs sont des ordres... "

Il se dirigea donc vers le pub que Marion avait désigné, suivant ce dernier avec une attitude inquiétante, comme une ombre silencieuse. Il avait toujours son sourire, mais les pensées de Lucius oscillaient dangereusement entre deux attitudes opposées: Mordre le libraire, le vider de son sang et partir, ou lui tenir compagnie jusqu'à l'aube, admirant ses beaux yeux. Ce n'était pas vraiment rassurant d'en arriver à de tels extrémités.

Musique du Pub

'Hum... oui, il y à quelques ... années...'

Marion sentit son sourire s'agrandire encore un peu et eut un hochement de tête satisfait. C'était une bonne chose que Lucius soit déjà entré dans un de ces bars, il se sentirait sans doute moins débordé.

'Je vous suit, vos désirs sont des ordres...'

Ses désirs étaient des ordres, vraiment? Très bien, alors il voulait savoir ce qu'il s'était réellement passé! Mais Marion savait faire la différence entre une plaisanterie gentillette et le sérieux. et cette phrase ne l'était pas. enfin, pas à cent pour cent. Ou peut-être que si.

Ca n'avait pas d'importance.

Ou peut-être que si. Merde, Marion, marche droit!

Le libraire rectifia légèrement sa trajectoire, en espérant sincèrement que cette légère déviation était passée innapperçue... Bien qu'il n'ait guère d'espoir quant à celà.
Est-ce que c'était lui, ou quelque chose avait changé dans l'atmosphère? Ben voyons Marion! Les Hallucinations, c'est pas encore de ton âge!

Le sorcier se secoua mentalement, et poussa la porte du pub, déplacement ainsi quelques flocons qui, finalement, semblaient vouloir tenir.
Aussitôt, un air de gigue les assaillit, vif et entraînant, qui passa bientôt sur des percussions plus envoûtantes.
Un jeune chiot de setter Irlandais (justement) faillit paser entre les jambes de Marion, qui le coinça prestement, et le pris dans ses bras.

Au milieu de la musique et du battement des bohdrans conjugué à celui des pieds, on ne pouvait pas manquer les conversations animée, les éclats de rires et le tintement des choppes de bière l'une contre l'autre. C'était une bonne soirée, en somme, et Marion se réjouissait à l'avance. D'autant plus qu'en entrant, il avait senti une vague de Magie si importante et diversifiée qu'elle ne pouvait signifier qu'une chose: tous les occupants, ou presque, pratiquaient une forme de magie quelqconque.

Marion repéra une table au fond, légèrement en retrait, et la désigna d'un hochement de tête, le chiot toujours dans les mains.

"Je pense que nous serons bien la bas, qu'en dites vous?"

Si Lucius voulait renoncer, c'était le moment ou jamais!

Plus ils avançaient à travers la nuit pour aller jusqu'au pub, plus Marion semblait perdu dans ses pensées. Lucius l'observait toujours, évidement, et nota à quel point le jeune homme déviait parfois de sa trajectoire pour ensuite la reprendre d'un pas plus raide. Cela était plutôt amusant à voir et il ne pu réprimer un sourire. La présence d'un humain aussi jeune était réellement rafraichissante. Le vampire captait quelques pensées du libraire et savait que ce dernier se doutait de sa nature ainsi que de ce qui s'était passé sur le balcon. Il fallait être prudent maintenant, histoire de ne pas devoir abréger la soirée plus tôt que prévu.

Marion poussa enfin la porte du pub et un air de musique envahit un instant la rue le temps qu'ils entrent à l'intérieur pour refermer la porte. Des airs entrainants, des gens riants à pleine gorge, des vieux tapants du pied, des jeunes se soulant à la bierre, la population de ce pub était très diverse. De gros feux de bois ronronnaient dans les âtres dans les coins de pièces et cette lumière chaude donnait à Lucius un air plus décalé encore, son visage paraissant encore plus blanc et froid que dehors. Ce qu'il l'inquiéta surtout fut les ondes magiques que ce pub dispersait. Voyant le sourire de Marion, le vampire en déduisit que lui aussi l'avait ressentit: Lucius était en territoire ennemi, ici il ne dirigeait pas tout. Il repéra même quelques sorciers qui semblaient aussi âgé que lui et qui lui jetèrent un regard interloqué en le voyant entrer.
Cette fois, pas de gaffe, les sorciers n'étaient pas tous de bons samaritains et certains devaient déjà savoir à qui ils avaient affaire avec Lucius.
Inconscient de ce qui pourrait se jouer pour le vampire, Marion lui dit d'un ton enjoué:

"Je pense que nous serons bien la bas, qu'en dites vous?"

Bien ? pas sûr. Pour la première fois depuis longtemps Lucius sentit ses entrailles se tordre sous le regard des anciens sorciers qui l'observaient, mais garda sa contenance à toute épreuve. Il ne voulait pas faire un bain de sang ce soir, et si ceux-là l'y forçait, ce ne serait pas une bonne soirée. Il fit un léger signe à Marion et le suivit jusqu'au fond de la salle pour aller s'asseoir à la table qu'il lui avait désigné.
Au moins, un peu en retrait comme cela, il ne se ferait pas trop remarquer.

Pour se détendre un peu Lucius fit un sourire à Marion et commenta les lieux de son ton avenant:

" C'est un très joli endroit dites moi. "

Rien à voir avec les lieux que fréquentait habituellement le vampire, mais il n'y fit pas allusion. Un chance qu'il se soit habillé sobrement pour sortir, sinon il aurait réellement été déplacé dans une telle atmosphère. Il demanda alors à Marion d'une voix hésitante:

" Mmm... vous désirez quelque chose ? Je vous invite. "

Se frayant un chemin entre les tables occupées, Marion se dirigea vers la table qu'il avait sélectionnée. Il avançait avec adresse entre les clients, sans même frôler le moindre dos. Les pubs bondés et les Irlandais étaient quasiment comme les doigts de la main: il avait appris à s'y déplacer sans encombre depuis longtemps à présent. Cela lui faisait du bien de se sentir en terrain connu, c'était rassurant. Et en plus, pour le coup, il pouvait marcher en zigzag sans que cela choquât qui que ce fut.

Du coin de l'oeil, il nota que les flammes du feu étaient peut-être un tout petit peu trop vives pour êtres vraiment naturelle, et une choppe qui lévitait doucement, à quelques millimètres d'une table. C'était son terrain, autant par la nature que par l'ambiance. Maintenant, il pouvait vraiment se détendre.
Le libraire et son compagnon atteignirent leur table sans encombre, mis à part peut-être quelques regards surpris: on ne voyait pas souvent de consommateurs en grande tenue dans ce genre d'endroit. Heureusement pour lui, Marion arborait un sourire si chaleureux qu'il ne vint pas à l'esprit des autres de le chasser, et ce fut tout juste s'il remarqua un ou deux coup d'oeil sceptiques en direction de Lucius. Evidement, il ne pouvait pas se douter qu'on attendait qu'il aie le dos tourner pour lancer ces derniers...

Enfin, il s'assit. Déposant négligemment sa cape sur le dossier de sa chaise, il cala le chiot sur ses genoux et survola la pièce du regard. Juste comme il aimait.

'C'est un très joli endroit dites moi. '

Oui, c'était un joli endroit. Marion acquiesça, tout en adressant un signe de la main au Barman, qu'il avait déjà eut l'occasion de croiser chez un apothicaire.

'Mmm... vous désirez quelque chose ? Je vous invite. '

Marion venait d'arrêter son chois lorsqu'une serveuse très rousse se dirigea vers eux, ses longs cheveux flottant derrière elle comme la queue d'une comète. Elle aussi, Marion l'avait rencontré, mais pas en France. C'était l'une de ses camarade de jeux lorsqu'ils étaient enfants, et en la voyant, le Sorcier ne pu réprimer une exclamation joyeuse.

"Maureen!" Il se redressa dans son siège, tandis que la femme s'approchait toujours. "Mon dieu, jamais je n'aurais pensé te revoir ici!"

La dénommée Maureen lui adressa un grand sourie, avant de s'adresser à lui:

"Dia duit Marion!" Fit-elle joyeusement. "Monsieur. Que puis-je pour vous?"

"Dia's Muire duit!" Répondit le Sorcier. "Je prendrais une bière, le do thoil."

Comme chaque fois qu'il se trouvait en présence d'Irlandais, Marion avait retrouvé sa vieille habitude de parler Gaélique. C'était une question de principe: entre Irlandais et sitôt que les anglais n'étaient plus représentés, on se parlait en Gaélique. c'était ce qu'on peut appeler de la résistance passive, en quelque sorte. C'était presque génétique, en fait.

Maureen prit hocha la tête pour signaler qu'elle avait enregistré la commande, puis se tourna vers Lucius pour prendre sa commande.

"Et pour monsieur, ce sera?"

Elle prit mentalement note de la commande du Vampire, puis se tourna vers Marion.[

"J'espère que tu viendras ici plus souvent à l'avenir!"

Marion sourit, amusé.

"Evidement! Maintenant que je sais que tu es là, je n'y manquerais pas."

La serveuse repartit vers le comptoir cherche leurs deux commandes, et Marion se tourna vers Lucius, un sourire doux et nostalgique sur les lèvres.

"Maureen et moi nous connaissons depuis l'enfance. J'ignorais qu'elle avait quitté l'Irlande."

Lucius se sentait gêné dans cette atmosphère qui n'était pas la sienne tandis que Marion semblait comme un poisson dans l'eau. C'était d'ailleurs tout à fait normal : dans un endroit bondé de vampire, Lucius était le maître, l'intimidant, le dirigeant et Marion n'était qu'un apéritif. Ici, c'était Lucius l'apéritif si l'on pouvait le dire ainsi, tandis que Marion était la familier de l'endroit, le petit protégé. Cela enrageait le vampire plus que tout, puisqu'il détestait être en position inférieure. Bouillonnant intérieurement, il lançait néanmoins autour de lui ces regards froids qui lui étaient propres et lui donnaient la contenance qu'il désirait. Car évidement, son charisme lui permettait de se sortir de n'importe quel embarras.

Après avoir proposé à Marion de choisir ce qu'il désirait, une serveuse à la chevelure flamboyante fit son apparition. Lucius ne lui accorda pas un seul regard, trop occupé qu'il était à observer les réactions purement humaines du libraire. Celui-ci sembla connaitre la jeune femme et fut ravie de la voir. Ils échangèrent quelques paroles en français puis d'autre en Gaélique vraisemblablement.

"Dia duit Marion!" Fit-elle joyeusement. "Monsieur. Que puis-je pour vous?"

"Dia's Muire duit!" Répondit le Sorcier. "Je prendrais une bière, le do thoil."

Le vampire pinça imperceptiblement les lèvres: il ne comprenait pas un traitre mot de gaélique et ignorait ce que les jeunes gens s'étaient dit, même si ce n'était visiblement pas grand chose. Pendant tous ces siècles Lucius avait appris à parler l'anglais, l'allemand et l'italien. Mais le gaélique, pas vraiment. Il observait Marion puis la serveuse, tous deux ravissants dans leur jeunesse vivace et leur gestes pleins d'entrain. Le vampire ne se lassait pas de les regarder.
La serveuse s'adressa alors à lui d'un ton beaucoup moins familier et indifférent, comme le font la plupart des serveurs.

"Et pour monsieur, ce sera?"

Lucius se contenta de lui répondre d'une voix neutre:

" Une bière s'il-vous plais. "

La serveuse repartit au comptoir après quelques paroles échangées avec Marion et ce dernier s'extasia de ses retrouvailles devant Lucius.

"Maureen et moi nous connaissons depuis l'enfance. J'ignorais qu'elle avait quitté l'Irlande."

Lucius lui fit un sourire sage, comme lorsqu'un enfant parle à son ancêtre et lui dit d'une voix douce:

" Oui la vie est pleine de surprise... "

La serveuse revint quelques instants plus tard, les deux commandes en main mais avec un nouveau regard. En effet, elle fixait à présent Lucius avec méfiance et celui-ci avait noté du coin de l'oeil qu'un vieillard venait lui murmurer quelque chose à l'oreille avant qu'elle ne revienne. Cela puait le complot à plein nez et le vampire fronça les sourcils.
Elle déposa les choppes sur la table puis regarda Marion un instant. Lucius fit alors en sorte de terminer ce petit manège.

" Quelque chose ne va pas mademoiselle ? "

'Oui la vie est pleine de surprise...'

Marion lui même ne réalisa pas à quel point cette phrase était ironique. La vie était pleine de surpris en effet puisque, du rôle du grand prédateur, Lucius venait de passer à celui d'amuse-gueule, sans nul doute pour son grand déplaisir. Seulement, ne l'ayant pas réalisé, Marion se trouvait dans l'incapacité totale de le protéger, même un tant soit peu, contre la colère de ses pairs.
Certes, on était en droit de se demander si Lucius avait réellement besoin de protection, mais enfin, c'était aussi l'intention, qui comptait, dans ce genre de situation. Mais donc, pour l'heure, Marion ne se doutait de rien, et battait tranquillement du pied la mesure de la gigue qui s'élevait dans le bar.

Maureen revint, déposant leurs bières sur la table, et Marion leva la sianne.

"A l'Irlande Libre."

Bien que français aux yeux de l'état, Marion avait grandi en Irlande, et il considérait cet endroit comme son seul et unique pays. Peu importait ce qu'on pouvait lui dire, dans son âme, il était Irlandais, c'est pourquoi lorsqu'il trinquait, il le faisait à l'Irlande libre, pas autrement.
La serveuse approuva son geste, avant de tourner son regard vers Lucius, l'air préoccupé. Marion n'avait pas remarqué qu'on s'était adressé à elle -le chiot avait manquer de se rompre le cou en voulant sauter de ses genoux, ce qui l'avait distrait- aussi fronça-t-il à son tour les sourcils.

'Quelque chose ne va pas mademoiselle ?'

Maureen sembla surprise, comme tirée de ses pensées. Qu'est-ce qui se passait, bon sang? Avec un sourire légèrement forcé -celui des mauvais jours, Marion l'aurais juré- elle répondit à Lucius:

"Le père O'Hara qui est la bas" Elle désigna le vieil homme qui s'était adressé à elle un instant plus tôt, "vient de me faire remarquer votre vêture. Il est rare de rencontrer des clients si visiblement fortuné par ici."

Il était vrai que, bien que la tenue de Lucius fut aussi sobre que possible, elle était de son rang, qui était largement supérieur à celui de n'importe qui dans le Pub. Même Marion, qui avait pourtant enfilé sa tenue la plus "somptueuse" si on pouvait le formuler de cette façon, dénotait moins sur le reste de la clientèle.
Toutefois, connaissant Maureen, et surtout connaissant Colum, il se doutait que ce n'était pas ce qui la préoccupait réellement. D'ailleurs, comme pour lui donner raison, elle se tourna vers lui et l'interrogea:

"Cé hé sin?"

Marion écarquilla les yeux. Pourquoi voulait-elle savoir qui était Lucius? Il aurait du lui suffire de savoir qu'il était avec lui, point! Le libraire réfléchit rapidement, et se souvint des quelques détails qu'il avait noté durant la soirée. Ses canines plus longues que la moyenne, son teint trop pâle pour être rassurant. Que savait Colum qu'il ne faisait que soupçonner?

"Sin é cara."

Il avait légèrement appuyé le mot cara qui signifiait ami. Maureen fronça les sourcils et, toujours en Gaélique, lui signala que son fameux ami était un vampire, et ami des Anglais, en plus. Les défauts suprêmes. toutefois, elle tourna les atlons sans rien ajouter. Au bout de trois pas cependant, elle sembla se souvenir de quelque chose d'important et se tourna de nouveau vers Marion et son compagnon.

"Au fait! Na Sasanaigh... Ils ont expulsé les O'Fitz."

Marion hocha la tête et serra sa choppe plus fort, jusqu'à s'en blanchir les jointures. cette nouvelle le touchait bien plus que d'apprendre la vraie nature de Lucius qui, s'il avait voulu le tuer, l'aurait déjà fait.
Il s'obligea à respirer calmement et à amener une expression neutre sur ses traits. tentative malheureusement vaine: tout le monde n'avait pas la pratique du Vampire.

"Maureen m'expliquait," Fit-il pour contourner le problème "qu'on vous tiens pour un ami des Anglais. Enfin, Colum au moins le pense. C'est très mal vu, chez les Irlandais."

Marion ne s'en faisait pas pour sa propre réputation. Les quelques armes qui avaient transité dans ses caisses de livres en direction de l'Irlande, et celles qui viendraient surement encore, ainsi que son attitude général à l'égard d'un Anglais -qui qu'il fut, ou qu'il le croise- lui assuraient de ne pas être ennuyé sur ce plan. En revanche, et cela il le savait, le double statut de Lucius risquait de lui attirer un certain nombre d'ennuis s'il remettait les pieds dans ce pub sans être accompagné de Marion.

Cela dit, s'il était réellement un Vampire, il ne pouvait pas ne pas avoir senti la magie qui émanait de ce lieu, aussi ne commettrait-il sans doute pas cette erreur. Marion soupira et avala une longue gorgée de sa bière. Tout ça était parvenu à lui gâcher sa bonne humeur. Pourtant, il aimait tout de même mieux savoir. Réfléchir était plus aisé lorsqu'on avait toutes les cartes en main.

"Le père O'Hara qui est la bas" Elle désigna le vieil homme qui s'était adressé à elle un instant plus tôt, "vient de me faire remarquer votre vêture. Il est rare de rencontrer des clients si visiblement fortuné par ici."

Lucius n'était pas stupide. Qui croyait-elle donc tromper avec son mensonge éhonté ? Certainement pas un homme de plus de deux cent ans, elle aurait du s'en douter. Lucius haussa les sourcils, septique, mais n'ajouta rien. Ce n'était pas la peine de discuter, et d'ailleurs la jeune femme se tourna vers Marion pour échanger de nouvelles paroles dans cette langue inconnue du vampire.
Sa vêture ! Il n'avait jamais entendu pareille sornette. D'ailleurs ce n'était même pas à lui, il l'avait volé sur le corps d'un humain qu'il avait tué lors d'une fête il y deux ans. Comme pour montrer son dédain il épousseta le revers de sa veste noire en velours tout en continuant de regarder froidement la serveuse, et de temps en temps le vieux débris au fond de la salle.

Visiblement la jeune femme avait demandé à Marion quelque chose qui ne lui plaisait pas car il écarquilla les yeux, comme s'il n'en revenait pas qu'elle ose lui demander... ce qu'elle lui avait demandé. Il lui répondit et Maureen ne sembla pas satisfaite de la réponse. Elle s'éloigna quelques instants plus tard après avoir ajouté une dernière phrase vide de sens pour le vampire.

"Au fait! Na Sasanaigh... Ils ont expulsé les O'Fitz."

Pourquoi changeait de sujet ainsi ? Qui était ces O'Fitz ? Lucius aurait bien aimé le savoir, il se sentait perdu et la colère montait doucement en lui comme un cobra relativement peu sympathique. A cette phrase le libraire sembla d'ailleurs se raidir, comme sous le coup d'une rage immense et peu contenue. Le jeune homme ne savait décidément pas contenir son expression ni ses sentiments, car le vampire eu un sourire en voyant que d'un coup tout n'allait pas pour le mieux de son côté non plus.

Maureen m'expliquait," Fit-il pour contourner le problème "qu'on vous tiens pour un ami des Anglais. Enfin, Colum au moins le pense. C'est très mal vu, chez les Irlandais."

Lucius pris un air ennuyé, et faisait de petits cercles sur le bois humide de la table avec son index. Il jeta un coup d'oeil à sa bière puis eu un ricanement. Il lâcha alors, sans même se préoccuper de cacher plus longtemps à Marion son statut.

"Je me fiche de ces pitoyables Anglais mon cher Marion. Tout comme je me fiche de chaque mortel présent ici ou ailleurs. Tout cela ne me touche plus depuis fort longtemps."

Il eu un sourire amer tout en fixant Marion de ses beaux yeux pâles. Oui, tout cela n'avait aucune importance. Ho bien sur il avait fréquenté une quantité innommable d'Anglais à Paris ou à Londres, mais il se fichait de la nationalité de ses victimes et prenait généralement le plus faible du lot sans distinction aucune.
Il regarda sa choppe de bière avec un dégout non dissimulé puis sortit de sa poche une flasque en argent - qui contenait une dose de sang - dont il but quelques gorgées sans que personne ne le remarque: il la remis ensuite dans sa poche.

" Vous devriez également dire à votre amie Maureen de cesser de mentir. C'est très impoli et je n'ai pas pour habitude d'être pris pour un imbécile. "

C'était ainsi qu'il faisait évaporer sa colère: il la dispersait en diverses phrases qui avait généralement les effets d'un coup de poing bien appliqué. Il ne perdait pas son sang froid d'ailleurs, le vampire était calme, comme s'il était posé chez lui, ses yeux fixait Marion avec quiétude malgré une lueur menaçante qui le mettait en garde contre tout geste brusque ou action incorrecte.
Après quelques minutes de silence il ajouta, d'un ton plus doux cette fois:

" J'ai toujours beaucoup aimé les Irlandais, ce serait donc regrettable qu'ils colportent sur moi je ne sais quels ragots... Mais j'allais oublier, qui sont ces fameux O'Fitz dont l'expulsion semble vous troubler ?"

Visiblement, le fait qu'on parle dans une langue qui lui était inconnue déplaisait fortement à Lucius. A dire vrai, il semblait de méchante humeur et, pour un peu, on l'aurait cru prêt à mordre. Mais très sincèrement, en cet instant, ce n'était pas la plus grande préoccupation de Marion: la situation des O'Fitz -et la sienne actuelle, dans une moindre mesure- le touchaient beaucoup plus.
Ayant inventé un mensonge à l'attention tout particulière du Vampire, Marion reçu sa réponse avec un calme assez surprenant, compte tenue de son état actuel.

'Je me fiche de ces pitoyables Anglais mon cher Marion. Tout comme je me fiche de chaque mortel présent ici ou ailleurs. Tout cela ne me touche plus depuis fort longtemps.'

Bien, on en venait enfin aux choses sérieuses. Les masques tombaient et, bien qu'il y aie un côté quelque peu angoissant à tout cela, c'était tout de même préférable à l'espèce de jeu de funambule auquel ils jouaient depuis le début. Maintenant, c'était carte sur table.

'Vous devriez également dire à votre amie Maureen de cesser de mentir. C'est très impoli et je n'ai pas pour habitude d'être pris pour un imbécile.'

Le libraire fronça les sourcils avant de rétorquer, plus acerbe qu'à l'accoutumée:

"Maureen fait ce qu'il lui semble bon de faire! On lui a toujours répété de ne pas amener ce sujet directement, elle obéit, c'est tout. Les gens comme vous sont un danger pour les gens comme moi, et plus encore pour les gens comme Maureen. Je ne voit pas ou est le mal à faire ce qu'elle peu pour se protéger et protéger ceux qu'elle aime."

Est-ce que les Vampires perdaient toute notion de peur, de sentiment, d'abnégation? Impossible... Si? Oh seigneur, voila que la question ne quittait plus le crâne du libraire. Pourquoi en mourant un homme aurait-il perdu la notion de précieux? Ce ne serait pas juste. Non, vraiment pas juste.

'J'ai toujours beaucoup aimé les Irlandais, ce serait donc regrettable qu'ils colportent sur moi je ne sais quels ragots... Mais j'allais oublier, qui sont ces fameux O'Fitz dont l'expulsion semble vous troubler ?'

Aimés oui, sans doute. Compris... Marion en doutait. Néanmoins il garda cette réflexion pour lui: la complexité de ceux qu'il considérait comme son peuple n'était pas à l'ordre du jour. Du moins, pas de cette façon, dirons nous.
Et puis est-ce qu'un Vampire était seulement capable de comprendre un humain? après pareille réaction, on était en droit d'en douter.

"La O'Fitz était ma nourrice, et c'est aussi la marraine de Maureen, c'est pourquoi l'expulsion de sa famille me met dans un tel état, mais en partie seulement. Les propriétaire anglais affament leurs fermiers, ne leur laissent rien qui vienne de cette terre -leur terre!- et les expulsent sitôt qu'ils n'ont plus les moyens de payer. Ils les humilient et les roulent dans la boue, depuis des centaines d'années maintenant. Aucun peuple ne devrait avoir à subir cela."

Le libraire se tut, le regard attristé et perdu dans la contemplation d'un entrelac gravé sur la table.

"Bah," finit-il par ajouter en regardant le fond de son verre, "des problèmes de roturiers Irlandais, tout ça. Je suppose qu'un Immortel n'a guère le temps de s'en soucier."

Ou, en tout cas, c'était l'impression que Marion en retirait.

"Maureen fait ce qu'il lui semble bon de faire! On lui a toujours répété de ne pas amener ce sujet directement, elle obéit, c'est tout. Les gens comme vous sont un danger pour les gens comme moi, et plus encore pour les gens comme Maureen. Je ne voit pas ou est le mal à faire ce qu'elle peu pour se protéger et protéger ceux qu'elle aime."

Lucius eu un sourire sans joie puis rétorqua d'une voix glacée au jeune homme:

" Voila une tirade bien vaine. Si je suis un danger, je peux aussi partir de suite. "

Ce n'était pas vraiment une menace, de toute façon il n'allait pas le tuer. Mais quand même, ce genre de réaction l'énervait, et il n'allait certainement laisser un jeunôt comme Marion lui marcher sur les pieds. Jamais !
Les vampires étaient par définition des êtres solitaires et peu enclin à se montrer au monde. Lucius faisait partie des vampires rebelles qui aimaient à se montrer en société: mais tout cela s'arrêtait là. Il fallait être mort aux yeux du monde pour mener une existance paisible. Lucius se fichait pas mal des états d'âme de Maureen, il ne l'aimait pas beaucoup. Certes il ne la connaissait pas, mais quelque chose en elle l'exaspérait. Peut-être parce qu'elle était très proche de Marion...

Le vampire écouta les explications du libraire sans rien dire. Il était normal qu'il protège son peuple, mais Lucius n'avait pas à s'en soucier outre mesure. Il lui expliqua donc qui étaient les O'Fitz et son regard triste le rendis mal à l'aise pendant quelques secondes. Il ne savait pas s'il comprenait les mortels, ou s'il les haïssaient... ou si encore il pouvait les aimer. Tous ces sentiments, toute cette peine... Il ne savait pas quoi en faire.

"Bah, des problèmes de roturiers Irlandais, tout ça. Je suppose qu'un Immortel n'a guère le temps de s'en soucier."

Sourire puis hochement de tête.

" Ne soyez pas si sûr de vous mon cher Marion. Je pourrais m'en soucier... mais j'ai beaucoup de problème de mon côté aussi. Je compati néanmoins, soyez en certain."

C'était le cas et Lucius ne voyait pas pourquoi il mentirai au jeune homme. Il ajouta donc:

" Vous pouvez me haïr si vous le voulez, ou me prendre pour une créature sans états-d'âme... mais je vit depuis très longtemps et je doit à présent aider mon propre... peuple... Excusez moi donc si je suis pas assez humain pour vous. "

Et c'était tout. Lucius n'avait pas envie de se voir ainsi dans les yeux de Marion, comme un être dangereux dont au final il n'aurait rien à faire. Si sa présence n'était pas désirée, il partirait de ce pub pour ne jamais y revenir.

Le faux sourire qui étira les lèvres de Lucius fit l'effet d'un coup de poing à Marion, qui se serait trouvé stupide, s'il avait pris le temps de réfléchir à tout ca.

'Voila une tirade bien vaine. Si je suis un danger, je peux aussi partir de suite.'

Piqué à son tour, vexé et sur les nerfs, le Libraire rétorqua avec humeur, mais san trop hausser le ton:

"Ne faites donc pas l'imbécile, vous savez très bien ce que je veux dire! Vous avez besoin de sang pour vous nourrir, et tout le monde ici sait qu'une rencontre avec un Vampire a toute les chances d'être mortelle. Je ne vous reproche pas d'être ce que vous êtes, mais ne reprochez pas à vos proies de vouloir éviter la mort! Tout le monde n'a pas ma chance."

Oui, Lucius était un danger, il ne fallait pas se leurrer. ce n'était pas sa faute, il était comme ça, c'était tout. Mais il ne pouvait pas en vouloir à ceux qui, traditionnellement, constituaient les repas de sa race, de vouloir se protéger contre lui, non!
et puis, comme l'avait fait remarquer Marion, tout le monde ne pouvait pas se vanter d'avoir passé une soirée complète... Non, deux, avec le soir de la librairie. Deux soirées en compagnie d'un Vampire, sans être tué, ni passer dans l'autre race? C'était un fait rarissime. Marion n'avait, en tout cas pas entendu parler de quoi que ce soit dans le même genre qui fut assez récent pour être intéressant.

Oui, Marion était un veinard. sinon, a quoi devait-il le fait que Lucius ne l'aie pas encore mordu? son charme? tu parles! et pourquoi pas son charisme, pendant qu'on y était! Il n'était rien d'autre qu'un petit libraire banal et sans grand intérêt, ce n'était certainement pas son "charme" qui lui avait sauvé la vie. Oui, mais quoi, dans ce cas?

'Ne soyez pas si sûr de vous mon cher Marion. Je pourrais m'en soucier... mais j'ai beaucoup de problème de mon côté aussi. Je compati néanmoins, soyez en certain.'

Compatir, oui. dans leurs situations respectives, c'était buien tout ce qu'ils pouvaient faire: compatir. Ils étaient trop différents l'un de l'autre pour déjà se comprendre. du reste, le pourraient-ils jamais? C'était la une excellente question, que Marion n'avait pourtant pas envie de se poser. Sans doute était-il trop tôt pour chercher à réellement comprendre Lucius. Il fallait surement se laisser le temps de l'apprivoiser, de mettre les choses à plat. ensuite seulement il serait possible d'étudier le tout.

'Vous pouvez me haïr si vous le voulez, ou me prendre pour une créature sans états-d'âme... mais je vit depuis très longtemps et je doit à présent aider mon propre... peuple... Excusez moi donc si je suis pas assez humain pour vous. '

Aussi surprenant que cela puisse paraître, à ces mots, Marion partit d'un grand rire, franc et bien moins nerveux que ce qu'on aurait pu croire. Il rit longtemps, ses épaules se haussant et s'abaissant à un rythme saccadé, des larmes perlant au coin de ses yeux.
Enfin, après un long moment, il parvint à reprendre à peu près son souffle, et savala une nouvelle gorgée de bière, avec la quelle il faillit s'étrangler.

"Si je puis me permettre, vous n'êtes plus humain, depuis longtemps maintenant. aucun humain digne de ce nom ne se nourrit du sang des autres. Je ne cherche pas à trouver en vous un humain, juste quelques restes d'humanité, il y a la une nuance à saisir."

Marion fronça les sourcils, redevanant sérieux, et détourna le regard en rougissant, gêné par ce qu'il allait dire.

"Je ne sais pas si vous réalisez à quel point il est effrayant d'avoir à faire à une créature si proche et en même temps si distante que vous. vous ne pouvez pas être humain. Vous ne le pouvez plus. Votre âge seul vous en empêche déjà, sans compter les nombreuses différence qu'il y faut ajouter."

Le libraire s'interrompit, faisant distraitement tournoyer le peu de bière qu'il lui restait dans sa choppe, avant de vider le tout d'une seule traite, comme pour se donner du courage. Peut-être en aurait-il besoin.

"Vous n'êtes plus humain depuis longtemps. Le seul nom des votre terrorise n'importe quel homme normal, et il inspire la crainte à bon nombre de Sorciers. Pourtant vous êtes ici, dans Paris, vous assistez à des fêtes, vous vous baladez dans les rues, vous avez vos pubs, vos restaurants et vos théatres favoris, comme n'importe quel Parisien ordinaire pourrait le faire. Vous nous ressemblez, et en même temps vous êtes trop différent pour que les choses soient simples. Très honnêtement, je ne comprends toujours pas ce qui vous a poussé à ne pas me mordre dès notre première rencontre."

Voila qui était dit. Les oreilles brûlantes, le regard porté du côté de la salle opposé à Lucius, Marion concontrait son attention sur le vieux colum, qui venait de tirer son bodhran de sous son manteau, et s'apprêtait à en jouer. Maureen, elle, s'installa à ses côtés avec une paire d'osselets, puis un violon entama une gigue, et les hommes se levèrent pour inviter les femmes à danser.

Ne pas penser. Ou alors juste à la gigue. Mais Marion, malgré toute sa volonté, ne pouvait opas s'empêcher de remarquer qu'il n'entendait aucune respiration à ses côtés...

Marion semblait piqué au vif après la réplique de Lucius. Oui, cette réplique était vaine, autant que cette pseudo-dispute pour savoir qui avait tord ou raison. En tout cas pour le vampire tout cela n'avais pas sens, même s'il faisait tout pour avoir le dernier mot.

"Ne faites donc pas l'imbécile, vous savez très bien ce que je veux dire! Vous avez besoin de sang pour vous nourrir, et tout le monde ici sait qu'une rencontre avec un Vampire a toute les chances d'être mortelle. Je ne vous reproche pas d'être ce que vous êtes, mais ne reprochez pas à vos proies de vouloir éviter la mort! Tout le monde n'a pas ma chance."

Tient donc, il semblait rudement calé sur le sujet pour quelqu'un qui faisait mine de ne rien savoir il y avait à peine deux minutes. Lucius haussa les sourcils dans une attitude mi-amusée mi-offusquée, se contentant de hocher la tête. Il ne voulait pas admettre que le libraire avait raison car... et bien cela ne se passait pas toujours ainsi ! Lui-même avait mis longtemps avant de transformer certains de ses enfants en vampires. Plusieurs années parfois, le temps de jauger leur capacité. Ce n'était donc pas un cas unique, même si les raisons qui le poussait à le laisser en vie était déjà un peu plus confuses.

Après leurs échanges houleux, et la phrase de conclusion du vampire, Marion éclata d'un grand rire. Cela eu pour effet de désarçonner quelque peu le vampire en même temps que de l'exaspérer. Et bien quoi ? Ce n'était pas à proprement parlé "comique" ce qu'il disait là ! Lorsque le libraire réussi à reprendre sa respiration pour lui répondre, Lucius s'était adossé confortablement au mur qui se trouvait derrière lui, et avait croisé ses mains sur son ventre comme il le faisait souvent lorsqu'il se trouvait chez lui à questionner ses indic'. Son trait n'était plus vraiment crispés, il était à nouveau détendu et ses grands yeux essayait de détecter ce qui tracassait Marion, au fond de lui-même.

"Si je puis me permettre, vous n'êtes plus humain, depuis longtemps maintenant. aucun humain digne de ce nom ne se nourrit du sang des autres. Je ne cherche pas à trouver en vous un humain, juste quelques restes d'humanité, il y a la une nuance à saisir."

Le libraire se mis à rougir, sans que le vampire ne sache pourquoi.

"Je ne sais pas si vous réalisez à quel point il est effrayant d'avoir à faire à une créature si proche et en même temps si distante que vous. vous ne pouvez pas être humain. Vous ne le pouvez plus. Votre âge seul vous en empêche déjà, sans compter les nombreuses différence qu'il y faut ajouter."

Lucius n'eut pas un sourire, la gêne de Marion n'en était pas une à ses yeux. Oui, il était effrayant. Il s'en délectait à un point que le libraire n'imaginait même pas. Il aimait sa puissance, sa persuasion, ce qui faisait que personne ne lui résistait bien longtemps. Néanmoins il comprenait que cela puisse troubler Marion. Il n'était plus proche des humains depuis longtemps, certes, mais cette part de lui subsistait toujours, et c'était cette part qui le poussait à mener une vie de gala et de soirée, une vie humaine. Cela le poussait aussi surement à laisser le libraire en vie, en plus du reste.

"Vous n'êtes plus humain depuis longtemps. Le seul nom des votre terrorise n'importe quel homme normal, et il inspire la crainte à bon nombre de Sorciers. Pourtant vous êtes ici, dans Paris, vous assistez à des fêtes, vous vous baladez dans les rues, vous avez vos pubs, vos restaurants et vos théatres favoris, comme n'importe quel Parisien ordinaire pourrait le faire. Vous nous ressemblez, et en même temps vous êtes trop différent pour que les choses soient simples. Très honnêtement, je ne comprends toujours pas ce qui vous a poussé à ne pas me mordre dès notre première rencontre."

Et ainsi Marion déblatérait sur le statut de vampire qu'avait Lucius, mais n'osait plus à présent le regarder en face. Il détournait les yeux, admirant les danseurs et les musiciens, comme s'il eu cru que Lucius ne lui réponde pas; ou parte. Lucius voulu alors éclaircir tous les points que Marion avait énoncés, lui répondant comme il répondrait à un ami à propos d'une discussion philosophique basée sur la clarté des raisonnements et des réponses apportées.

" Mon cher Marion... Je me permet déjà de reparler de cette distance que vous évoquez, les restes d'humanités que vous cherchez en moi... Sachez que cette humanité s'échappe de jour en jour de mon esprit. J'essaye de la rattraper mais elle devient peu à peu inconsistante, comme un brouillard épais... Et pourtant, contrairement à ce que vous semblez penser: j'y tient. Pourquoi croyez-vous que je mêle encore aux foules enivrantes des fêtes, des banquets ? Pourquoi croyez-vous que je m'habille à la dernière mode, que je suis ici à cet instant dans un pub irlandais en compagnie d'un libraire tel que vous ? Votre vie, votre sang, votre vigueur me charme autant qu'elle m'effraie...."

Le ton du vampire était bas, presque un murmure doucereux que Marion pouvait cependant saisir parfaitement de là ou il se trouvait. Lucius parlait lentement, et une lueur de tristesse était apparue dans ses yeux bien qu'il n'en laissa physiquement rien paraitre. Ces sentiments, il n'en avait jamais parlé à personne. Même Armant n'en savait rien. Personne.
Il ressortit sa flasque pour en boire une gorgée, sans toucher à sa bière, puis poursuivit:

" Quand à ce qui m'a poussé à ne pas vous mordre dès le début, je pense que c'est avant tout mon attirance envers vous. Ho je ne me l'explique pas voyez-vous... et ne prenez pas cela comme une injure peu catholique, mais il se trouve que vous avez une aura plaisante, une façon... rafraichissante de voir le monde qui vous entoure. Le fait que je me sente moins seul en vous parlant peut-être... ou qu'en sais-je... "

Pour une fois il n'avait pas tourné autour du pot et il en était satisfait. C'était à présent cartes sur table. Lucius n'avait jamais eu honte de ses pensées ni d'aucune de ses actions. Il se fichait à présent de savoir si Marion allait partir, rester ou se taire, car il avait lâché ce poid qui l'emprisonnait depuis le début de la soirée. Il était en parfaite quiétude et continuait d'observer le libraire par dessus de goulot de sa flasque en argent.

'Mon cher Marion... Je me permet déjà de reparler de cette distance que vous évoquez, les restes d'humanités que vous cherchez en moi... Sachez que cette humanité s'échappe de jour en jour de mon esprit. J'essaye de la rattraper mais elle devient peu à peu inconsistante, comme un brouillard épais... Et pourtant, contrairement à ce que vous semblez penser: j'y tient. Pourquoi croyez-vous que je mêle encore aux foules enivrantes des fêtes, des banquets ? Pourquoi croyez-vous que je m'habille à la dernière mode, que je suis ici à cet instant dans un pub irlandais en compagnie d'un libraire tel que vous ? Votre vie, votre sang, votre vigueur me charme autant qu'elle m'effraie...'

Pourquoi se joignait-il aux fêtes humaines? Honnêtement, et à sa grande honte, Marion ne s'était jamais posé la question. Peut-être avait-il supposé que ce n'était pour lui qu'un moyen de trouver des proies à sa convenance, qu'en savait-il? Il n'était pas un Vampire, lui! On ne pouvait pas lui demander de comprendre spontanément ce qui se passait dans la tête d'un éternel. Pas encore, du moins. quand il en serait arrivé à son troisième siècle d'existence, peut-être. Mais pas avant.

'Quand à ce qui m'a poussé à ne pas vous mordre dès le début, je pense que c'est avant tout mon attirance envers vous.'

Surpris, Marion se retrouna brusquement vers le Vampire. Ce n'était vraiment, mais alors vraiment pas le genre de phrase à laquelle il s'était attendu. Et puis, et puis, qu'elle attirance, d'abord? Il était en train de rêver là, forcément!

'Ho je ne me l'explique pas voyez-vous... et ne prenez pas cela comme une injure peu catholique, mais il se trouve que vous avez une aura plaisante, une façon... rafraichissante de voir le monde qui vous entoure. Le fait que je me sente moins seul en vous parlant peut-être... ou qu'en sais-je...'

Marion savait bien qu'il aurait du être détendu, ayant entendu ça. Pourtant, la seconde phrase de Lucius eut l'efet inverse, le crispant encore davantage. Et pourquoi d'abord, il n'y avait aucune raison à cela, zut alors!

"Rafraichissante, hein?"

D'un geste de la main, Marion rappela Maureen, qui rappliqua aussitôt, laissant ses osselets en plan.

"Oui?"

"Je voudrais un plat du jour, s'il te plaît."

"Ca marche!"

Elle ne semblait toujours pas convaincue que Lucius puisse rester dans le pub sans présenter de Danger pour les autres, mais au moins avait-elle accepté l'idée qu'il soit là en tant qu'invité de Marion, et que par conséquent il y resterais probablement aussi longtemps que lui.

"Je dois avouer," reprit-il à l'adresse de Lucius, "que je ne saisit pas ce que vous voulez dire par la. J'imagine que l'âge y est pour beaucoup, il me faurdrait sans doute quelques... Hum... 'années' de plus pour comprendre ce genre de choses."

Le libraire fit une pause, durant laquelle Maureen lui apporta son plat du jour, et il en grignota quelques bouchées, avant de reprendre:

"Je... Je vous prie d'excuser ma brusquerie. Je n'avait nullement l'intention de vous vexer, simplement... J'avoue que votre présence à tendance à me... troubler. C'est le mot, je crois."

Marion aurait donné n'importe quoi pour calmer les battements erratiques de son coeur. Ses oreilles chauffaient de plus en plus, tout comme ses joues, du reste, et il avait de plus en plus envie de rentrer dans un trou de souris. Il ne savait même pas pourquoi il était si mal à l'aise du reste, et cela contribuait à augmenter sa gêne.

Pour un peu, il aurait pu en venir à commander un alcool plus fort, malgré son absence totale de résistance à ce type de boisson...

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